C’est l’un des plus grands projets d’aménagement en Europe. Depuis 20 ans, l’Etablissement public d’aménagement Euroméditerranée (EPAEM) anime l’évolution de Marseille. Et pas seulement au niveau immobilier ou architectural. Comme le souligne François Jalinot, le directeur général et pilier de l’institution, « au-delà de l’opération immobilière connue de tout le monde, Euroméditerranée c’est un vrai concept au niveau économique, de support économique pour les entreprises. Et ce concept, il doit irriguer à l’échelle de toute la région. » Lors d’un déjeuner avec la presse le 2 février dernier, Laure-Agnès Caradec, la nouvelle présidente (LR), élue en décembre en remplacement de Bernard Morel (PS), entourée des principaux cadres de l’EPAEM, a fait un tour d’horizon des dossiers portés par Euroméditerranée. Nous vous proposons tout au long de la semaine, de faire la synthèse des sujets évoqués.
A commencer par le projet qui va fédérer les nouvelles énergies au cours des 20 prochaines années : Euroméditerranée 2, c’est à dire l’extension du projet vers le nord, jusqu’à l’avenue du Capitaine Gèze dans le 15 ème arrondissement. Cet espace comprend de nombreux espaces : XXL, gare multimodale du capitaine Gèze, parc des Aygalades, Zac littorale, îlot Allar… Ce dernier est en phase opérationnelle depuis le lancement des travaux des immeubles d’une opération baptisée Smartseille. « C’est un démonstrateur qui se veut exemplaire à l’échelle de la création de la ville méditerranéenne durable, avec des techniques innovantes. La Ville de Marseille a la volonté d’accompagner cette dynamique puisque la ville s’est portée acquéreur d’un des bâtiments pour y mettre des services municipaux » souligne Laure-Agnès Caradec.
Des synergies envisagées avec la Plaine du Var à Nice
Pour avancer sur le thème de la Méditerranée durable, « Lac » pour les intimes, compte bien s’appuyer sur les nouveaux représentants de la Région au conseil d’administration, notamment la Niçoise Agnès Rampal. « Nous avons la volonté de donner un véritable rayonnement régional à Euroméditerranée, une volonté de travailler en synergie avec l’autre opération d’intérêt national qui est celle de la plaine du Var. Agnès Rampal s’occupe aussi des relations avec la Méditerranée dans les Alpes-Maritimes. Il faut impérativement que l’on arrive à créer des synergies pour que l’on ait un rayonnement régional. »
Début de commercialisation encourageant sur Smartseille
Les premiers immeubles de Smartseille de l’îlot Allar seront livrés en septembre 2016. (Photo Eiffage DR)
Concernant le début de la commercialisation de Smartseille, Euroméditerranée assure qu’Eiffage l’opérateur du périmètre Allar se montre satisfait. « 60 logements ont été ouverts à la vente sur des budgets autour de 3000 euros m2. Il ont eu un très bon retour et c’est très encourageant pour la suite » observe la présidente d’Euroméditerranée. Des services de la Ville s’installeront sur le site en septembre 2016, dans l’immeuble des architectes Edouardo Souto de Moura et Jacques Sbriglio. La livraison des premiers logements est annoncée pour septembre 2017. Sur le périmètre XXL, l’unité d’hébergement d’urgence présente sur la zone sera maintenue sur place et réhabilitée. Laure-Agnès Caradec insiste : « c’estle plan guide de François Leclerc (lire plus bas) qui structure l’aménagement de ce territoire. Il y aura un urbaniste pluridisciplinaire qui va travailler pour affiner la manière dont on va se construire ce projet mais avec comme plan guide et comme épine dorsale le plan de Francois Leclerc. »
La nouvelle corniche ? Une décision conjointe de l’Etat et de la Métropole
Concernant la nouvelle corniche envisagée sur les esquisses, en bordure de XXL côté port, François Jalinot précise qu’il y a des études qui sont en cours et qui se poursuivent. XXL fonctionnera dans un premier temps avec des aménagements provisoires. Côté littoral, « l’élément déclencheur de la réalisation de cette corniche, en dehors des études, ce sera la durée de vie de la passerelle autoroutière qui est un équipement qui appartient à l’Etat. La raison pour laquelle nous avons conçu cette corniche, c’est que l’on sait qu’à terme cet équipement va être obsolète, compte tenu de la salinité, de la proximité de la mer, le fait qu’il n’est plus aux normes (il n’y pas de bande d’arrêt d’urgence, il est trop étroit, etc). Francois Leclerc a l’intelligence d’apporter une solution sans couper la circulation. On peut réaliser cette corniche tout en maintenant la circulation de transit. On est pas encore au stade de la décision. Et la décision elle appartiendra à la Métropole, conjointement avec l’Etat. C’est pas demain. » « On est dans un projet à l’échelle de 20 ans » rappelle enfin la présidente d’Euroméditerranée.
L’incertitude règne aussi quant au calendrier de mise en oeuvre du parc des Aygalades dont l’avenir dépend notamment du transfert de la gare du Canet, qui elle-même aura son sort fixé par l’avenir du terminal combiné de Mourepiane. Un dossier complexe où le port et la ville sont impliqués. Nous y reviendrons dans la suite de notre série.
[Verbatim] XXL, l’abécédaire de l’Appel à manifestation d’intérêt (AMI) Les explications de Paul Colombani, le directeur général adjoint d’Euroméditerranée.
Pourquoi cette méthode inédite ?
« Parce qu’on disposait d’un espace relativement important sur lequel on avait la volonté de faire sortir rapidement une masse critique susceptible de changer l’image de ce secteur, qui est aujourd’hui une image difficile en discontinuité avec celle d’Euromed’ 1. Nous n’avions pas tous les éléments de contraintes susceptibles de nous faire écrire un cahier des charges précis pour choisir un promoteur en face de nous; notamment des discussions que nous pourrions avoir avec le marché aux puces mais pas que; la question de la re-qualification de Capitaine Gèze qui reste quand même l’un des aspects essentiels de la mobilité, la livraison du pôle multimodal Gèze, la continuation ou non du tramway, le noyau villageois des Crottes, etc. Du coup, on a lancé un Appel à manifestation d’intérêt destiné plus à comprendre le process de création d’un projet et de le travailler avec nous; bien évidemment de travailler la concertation avec l’environnement immédiat (le marché aux puces, les habitants), réaliser une concertation au fur et à mesure de la réalisation du projet pour arriver finalement à faire le projet.
Vue partielle du périmètre XXL avec au centre le marché aux puces (Photo Euroméditerranée XDR)
Quelles sont les principales étapes du projet ?
Après le choix de l’opérateur Bouygues (je rappelle que c’est l’alliance de Bouygues Construction et Bouygues Immobilier, ce qui historiquement ne s’est jamais fait en France), on a la mise au point du projet. On encadre complètement le travail de Bouygues dans le cadre d’une convention qui fixe les objectifs. En disant voilà : dans les six premiers mois, vous mettez en place le projet urbain et en parallèle on lance les enquêtes publiques qui permettent de concerter. Et puis à partir du moment où on a les retours des enquêtes publiques, les six mois d’après servent à la mise au point urbanistique du projet et des macro lots qui vont devoir sortir. On n’en est pas encore à la phase architecture des bâtiments. L’ensemble de l’espace de permis à bâtir est de 280 000 mètres carrés sachant que le groupement Bouygues n’en réalise que 200 000. Ce qui est déjà assez considérable. Donc on encadre toute cette procédure durant un an et ensuite on passe un accord-cadre beaucoup plus classique qui consiste à dire : le phasage prévisionnel c’est celui-là et donc la première promesse de vente sera passée à telle date et aura telles conditions suspensives; la deuxième à telle date, etc. On décline alors un dispositif plus classique d’aménageur.
Où en est on aujourd’hui ?
La partie innovante est en cours. Nous espérons signer la convention d’ici quelques semaines, deux à trois semaines (fin février, NDLR). Ensuite on va lancer le process de concertation. En parallèle, Bouygues va chercher à avoir des équipes de maîtrise d’oeuvre en face de nous pour que nous puissions discuter, notamment en se dotant d’un « urbaniste », sachant toutefois que le plan général d’urbanisme de la zone c’est François Leclerc qui le fait. Mais il faut bien que Bouygues puisse tester un certain nombre d’idées en interne. On va faire cela dans le cadre d’ateliers. On va ensuite préciser le projet tout au long de l’année. »